
Un pâle soleil d’hiver illumine la façade et les arcades de l’hôtel des Invalides, mais la cour reste dans l’ombre. Au centre, posé sur les pavés froids, le cercueil, couvert d’un drapeau français. Juste au-dessus, entre deux galeries, le portrait géant de Jacques Delors, costume en tweed et cravate club d’un autre âge, mort le 27 décembre, à l’âge de 98 ans.
Emmanuel Macron présidait, vendredi 5 janvier, l’hommage national rendu à l’ancien ministre de François Mitterrand et président de la Commission européenne, figure de la « deuxième gauche » et de l’Europe, dont il fut un ardent promoteur. Un « grand Français » et un « honnête homme européen », a résumé le président de la République devant sa fille, la maire socialiste de Lille, Martine Aubry, qui fut associée à la préparation de la cérémonie, tout comme son ancien chef de cabinet à Bruxelles, Pascal Lamy.
Dans un éloge funèbre sobre et sensible et, pour une fois, plutôt bref, Emmanuel Macron a retracé le « parcours de méritocratie républicaine » de ce petit-fils de paysans corréziens, fils d’une mère chapelière et d’un père employé de la Banque de France, invalide depuis la Grande Guerre, qui répétait : « Il faut réconcilier. » Il a évoqué les valeurs de ce catholique humaniste formé à l’école personnaliste d’Emmanuel Mounier, animé par « le sens du devoir avant le goût du pouvoir », qui renonça à se présenter à l’élection présidentielle à la fin des deux septennats de François Mitterrand, en 1995.
Une même méthode sur la scène européenne
Le chef de l’Etat a également vanté la « méthode » de ce social-démocrate habité par le sens du dialogue et de la négociation, occupé à « bâtir des ponts », « par-delà les oppositions politiques ». Il a loué les « talents de conciliateur » d’un homme « qui ne s’est jamais conformé aux habitudes ni aux attendus », lui qui avait d’abord choisi de s’engager derrière le gaulliste Jacques Chaban-Delmas et sa « nouvelle société » avant de devenir l’apôtre des « transcourants » au sein du Parti socialiste, qu’il a rejoint en 1974.
Jacques Delors, a rappelé Emmanuel Macron, a joué un rôle décisif dans le « tournant de la rigueur » de 1983, alors qu’il se trouvait à Bercy, contribuant à « réconcilier le socialisme du gouvernement avec le marché, et les Français avec l’économie ». « Un chemin de crête qui s’éloigne des facilités et des faux-semblants, qui tient la Nation et l’Europe, la force économique et la justice sociale, le réel et l’idéal ensemble », a-t-il résumé.

Une méthode qui fut aussi la sienne sur la scène européenne, dont Jacques Delors fut l’un des architectes, à la fois patient et obstiné. « Le visage de l’Europe d’aujourd’hui, Jacques Delors a contribué à le dessiner, trait par trait », a insisté M. Macron. Une référence à l’héritage laissé par M. Delors à l’issue de son double mandat bruxellois (de 1985 à 1995), du marché unique à l’espace Schengen de libre circulation des citoyens européens, en passant par la genèse de l’euro, en pleine réunification allemande, après la chute du Mur de Berlin, le programme Erasmus de mobilité des étudiants et les fonds de cohésion en faveur des régions pauvres. Le chef de l’Etat a repris la formule ciselée par l’ancien responsable européen, gage, selon lui du bon fonctionnement de l’Union européenne : « La compétition qui stimule, la coopération qui renforce et la solidarité qui unit. »
Il vous reste 60% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.
from France - Dernières infos - Google Actualités https://ift.tt/i8twy2V
via IFTTT
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire